Ramona au Festival d’Avignon et au Monfort par Angélique Lagarde
Posté par angelique lagarde le 25 juillet 2017
Ramona © Christophe Raynaud De Lage
Ramona
Texte, mise en scène, marionnettes, scénographie de Rezo Gabriadze
Avec Tamar Amirajibi, Giorgi Giorgobiani, Vladimer Meltser, Anna Nijaradze, Nino Sajaia et Irakli Sharashidze
Vu au Festival d’Avignon, programmé à la Maison Jean Vilar du 11 au 17 juillet à 16h et 19h
Du 7 au 18 novembre au Monfort puis en tournée française jusqu’en avril 2018 (liste des dates en fin d’article)
La mécanique de l’ancien monde
Ramona, la jolie locomotive est coincée en gare, elle n’a pas le droit de s’écarter des rails, l’administration veille. La métaphore est vite faite avec le régime de ce que l’on appelait alors l’URSS, mais bien faite. Puis le cirque arrive, avec toute son imagerie fantasmée des pays de l’Est. Mais avant tout, Ramona est une histoire d’amour, une passion brûlante entre deux locomotives mais aussi, un amour de Rezo Gabriadze du temps jadis, la nostalgie de son enfance.
Rezo Gabriadze aime créer à partir d’un mot, d’une phrase qui lui trotte dans la tête. Aussi l’origine de cette création vient d’une phrase de Rudyard Kipling : « Les locomotives, avec les moteurs de bateau, sont les machines les plus promptes à éprouver des sentiments. ». La locomotive lui est alors apparue comme une évidence pour incarner le personnage principal de sa nouvelle création consacrée à la vision nostalgique de l’URSS de son enfance. Très vite, autre témoin de ce monde en disparition, l’image du chapiteau de cirque est intervenue. Comment relier les deux ? Très simplement : la locomotive Ramona, amoureuse d’une grosse machine d’acier toujours sur les routes, brise ses chaînes, fait fi des interdictions et se lance dans une aventure extraordinaire pour sauver un cirque sur le déclin ! Aussi fantasque que jubilatoire, le périple de cette petite locomotive nous amuse à prime abord, mais très vite, crée une véritable empathie. Si les codes culturels et sociétaux ne sont pas les nôtres, ils questionnent sur le rapport à l’autre et quoi qu’il en soit, la sensation du temps qui file entre les doigts et du présent qui industrialise, est universelle.
Ramona © Christophe Raynaud De Lage
La forme également semble empreinte d’une certaine nostalgie, tout d’abord par l’usage d’un castelet, ce qui se fait de plus en rare dans la marionnette contemporaine. D’autre part, la particularité du théâtre de Rezo Gabriadze est de composer avec des voix enregistrées qui viennent se poser sur les actions des manipulateurs. Le metteur en scène est extrêmement connu en Géorgie pour son travail au cinéma et son attention au jeu d’acteur, aussi il souhaite appliquer cette même exigence à la marionnette. Il utilise donc la voix enregistrée pour mieux la donner à entendre, et dissocier l’action. C’est un peu le principe du Bunraku avec un narrateur écarté de la marionnette. La musique également est enregistrée, ici en l’occurrence, elle nous projette tout droit dans l’imagerie des pays de l’Est que véhiculent les films d’Emir Kusturica. Cette façon de faire, et l’usage d’un castelet animé par des manipulateurs vêtus de noir mais à visage découvert, nous procure la sensation étrange d’assister à un film d’animation vivant.
Rezo Gabriadze a composé avec Ramona une ode à l’amour tout à fait originale, emprunte d’une douce nostalgie, à la lisière de la marionnette et du cinéma d’animation, un objet unique à découvrir absolument !
Angélique Lagarde
Tournée 2017-2018 :
7 au 18 novembre 2017, Le Monfort, Paris
30 novembre et 1er décembre, La Filature, Mulhouse
9 au 13 décembre, Théâtre national de Nice
15 au 22 décembre, Théâtre des Célestins, Lyon
13 et 14 mars 2018, Le Bateau Feu, Scène nationale de Dunkerque
20 et 21 mars, La Rose des vents Scène nationale Lille Métropole Villeneuve d’Asq
27 mars, Théâtre Paul Éluard de Choisy-le-Roi
3 avril, Théâtre de Corbeil-Essonnes
7 avril, Scène 55, Mougins