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Rencontre avec le danseur et chorégraphe Victor Ullate

Posté par angelique lagarde le 22 septembre 2014

Víctor Ullate

Victor Ullate © Enrique Cidoncha

De Béjart à Morente, l’équilibre parfait

Victor Ullate, danseur et chorégraphe espagnol de renommée internationale a débuté sa carrière dans le Ballet du XXe s. de Maurice Béjart qui a créé pour lui plusieurs pièces. Le Ballet Victor Ullate qu’il a fondé il y a 25 ans et qu’il dirige a créé son style de danse contemporaine en fusionnant la tradition, la technique classique avec une esthétique moderne.

Kourandart : Vous avez commencé votre carrière professionnelle dans le Ballet du XXe Siècle de Maurice Béjart où vous êtes resté 14 ans. Que vous a-t-il apporté ?
Victor Ullate : J’étais très fier de faire partie de sa compagnie. Quand on travaille avec un tel génie que Béjart, on s’imprègne totalement de son langage scénique, on est marqué par l’esprit de son travail. C’est un enracinement mais après il faut trouver sa propre voie. Maurice a été très important dans ma vie, il m’a donné la chance de me faire connaître comme danseur et chorégraphe. J’ai dansé beaucoup de ballets avec lui, le dernier que j’ai créé avec lui était Gaieté parisienne. C’était un grand cadeau pour moi. Il avait une façon particulière, personnelle de diriger les danseurs. Il nous a transmis beaucoup de choses : la volonté, la discipline, la passion pour la danse, la musique, pour les textes des poètes, la curiosité pour d’autres cultures même très éloignées comme celle de l’Inde. J’ai écrit un ballet qui s’appelle Samsara qui est un voyage en Orient et un hommage à Béjart.

Vous reprenez cette année El Sur que vous avez créé en 2005. Peut-on dire que vous avez constitué un répertoire de la compagnie tout au long de son parcours de 25 ans ?
Il y a des ballets que je ne reprendrai jamais parce qu’ils correspondent à des moments très particuliers de ma vie. En revanche,  je reprends souvent certaines pièces comme Jaleos, Y, Après toi, Boléro. J’ai fait El Sur pour transmettre l’immense passion, l’admiration que j’ai pour l’art d’Enrique Morente, pour sa voix et celle de sa fille Estrella Morente. Il m’a beaucoup encouragé pour créer ce ballet. On était des voisins et des amis très proches.

Le flamenco a toujours été au cœur de votre travail…
J’ai fait mes débuts dans la danse avec le flamenco. Quand j’ai fini mes études de danse classique, le grand danseur de flamenco Antonio Ruiz Soler m’a vu danser et m’a engagé dans sa compagnie. J’y suis resté trois ans. C’est grâce à lui que j’ai pu connaître tout ce patrimoine populaire de la danse andalouse.

Vous avez créé votre propre style, un langage chorégraphique dans lequel on retrouve à la fois des traces de danse classique, de la tradition populaire andalouse, du flamenco et des éléments très modernes de la danse contemporaine. Cet enracinement de la création contemporaine dans la tradition est une chose très particulière en Espagne…
J’essaye de fusionner ces éléments dans ma création. Je cherche à saisir non pas la forme ou la lettre mais le sens, le parfum, l’âme profonde du flamenco en le fusionnant avec la technique classique et moderne. C’est cela qui caractérise mon travail de chorégraphe. Très curieusement ce langage chorégraphique a un impact universel. Par exemple ma pièce très andalouse Jaleos a eu une réception incroyable à New York. Pendant le spectacle le public debout applaudissait si fort que les danseurs n’arrivaient pas à entendre la musique.

Dans tous vos spectacles les passions fortes s’incarnent dans la danse. El Sur a pour trame une histoire de l’amour qui s’accomplit dans la mort. Ce thème comme celui de la liberté de la femme, et un thème lorquien…
Je me suis inspiré en particulier de Yerma de Lorca pour construire à ma façon cette histoire en prenant par rapport à cette pièce certaines libertés.

Outre vos propres pièces vous avez mis en scène des chorégraphies d’autres créateurs comme William Forsythe, Balanchine, Béjart, Hans van Manen, Nils Christie etc… En quoi ce travail sur des œuvres d’autres artistes enrichit votre propre démarche ?
V. U. – J’ai toujours une grande admiration pour Balanchine qui reste un inventeur génial du néoclassicisme. Forsythe s’inspirait beaucoup de Balanchine, moi aussi. Je suis curieux de tout, je vois beaucoup de choses. C’est une nourriture naturelle, stimulante, comme pour un peintre d’aller voir dans les musées des chefs-d’œuvre des grands maîtres.
Pour moi c’était Balanchine, Béjart et d’autres mais ce qui est fondamental c’est d’arriver à trouver son propre style, son propre vocabulaire. Je n’oublierai jamais ce que Béjart m’a dit : « crée ton propre style avec ta compagnie. Vous avez en Espagne un art populaire très riche. Il faut puiser dans ce trésor mais aussi le repenser, le traduire à ta façon. »
C’est ce que j’essaie de faire par rapport au flamenco. Je ne veux pas faire du flamenco mais en prendre des couleurs, des instants, des sonorités, des impressions.

Quels sont vos projets immédiats ?
Après la série de représentation de El Sur au Teatro del Canal à Madrid nous allons tourner cette œuvre mais aussi quelques autres : Jaleos, Y, Après toi, Boléro et l’Art de la danse en France, en Espagne et en Belgique. En août, dernier j’étais en résidence à l’Opéra de Vichy où j’ai recréé L’amour sorcier de Manuel de Falla avec Estrella Morente qui chante dans le spectacle. C’était un immense succès. Nous allons le présenter à l’Opéra de Madrid à la fin cette année. Nous travaillons et tournons beaucoup en France qui est ma deuxième patrie.

Propos recueillis par Irène Sadowska Guillon

Lire l’article d’Irène Sadowska Guillon sur El Sur

Tournée française

28  septembre à Arcachon : Jaleos – Y – Après toi – Bolero

30 septembre à Bergerac : El Sur. Hommage à Enrique Morente

2 et 3 octobre 2014 à Albi : Jaleos – Y – Après toi – Bolero

26 novembre 2014 à Marseille : Jaleos – Y – Après toi – Bolero

9 janvier 2015 à Biarritz : Jaleos – Y – Après toi – Bolero

12 et 13 février 2015 à Rueil-Malmaison : Jaleos – Y – Après toi – Bolero

Plus d’informations et dates de tournée internationale : www.victorullateballet.com

Biographie d’Enrique Morente (1942 – 2005)

Chanteur et compositeur, rénovateur génial du flamenco, contesté et considéré comme provocateur et iconoclaste par les traditionnalistes. Enrique Morente a mêlé le flamenco avec d’autres types de musique : classique pour orchestre symphonique, cubaine, africaine et même punk rock et a joué avec des musiciens de divers styles. Il a écrit des musiques entre autres sur les textes de Saint Jean de la Croix, Lorca, Lope de Vega, Antonio Machado, Jorge Guillen, etc et a composé des musiques pour le théâtre, le cinéma et la télévision. Il a chanté dans le monde entier depuis New York jusqu’au Japon en passant par plusieurs pays d’Europe y compris la France (Olympia de Paris). Plusieurs de ses CD épuisés ont été récemment réédités. Enrique Morente non seulement a rénové le flamenco mais a créé en même temps une tradition. Certains de ses cantes sont interprétés par d’autres grands flamenquistes comme Camaron de la Isla, Mayte Martin, Carmen Linares.

 

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