Le Palmarès du théâtre 2013 par Marie-Laure Atinault
Posté par angelique lagarde le 2 mai 2013
Le Palmarès du théâtre 2013
Adieu les Molières, bonjour le palmarès ?
On allait voir ce qu’on allait voir, une grande soirée dédiée au théâtre réalisée dans un studio ! La première partie réservé au Palmarès sèche comme un coup de brigadier, malgré la belle émotion des lauréats n’a retenu l’attention que des spectateurs très motivés par le sujet. La deuxième partie avec La troupe d’un soir devait démontrer que le théâtre n’est pas ennuyeux ; ce que nous démontrons chaque jour dans nos colonnes ! Mais les projections de rideau rouge et le micro des comédiens pas toujours inspirés ont déçu. Nous étions en direct dans la salle et voici nos impressions !
Dimanche 28 avril 2013, France 2 présente la grande soirée du théâtre, à 19h la remise du Palmarès, puis après le journal La troupe d’un soir, qui confirme que les instances télévisuelles n’ont toujours rien compris aux attentes des spectateurs au sujet du théâtre. La confusion est grande tant du côté de certains professionnels que du côté du public, quid des Molières ? En Avril 2011, la soirée des Molières est annulée. Vingt neuf directeurs de théâtres dont Pierre Lescure, ex Président des Molières et directeur du Théâtre Marigny, quittaient l’Académie des Molières. Malgré les efforts du Ministère de la Culture, aucune réconciliation entre les dissidents et les membres restants des Molières ne fut possible.
La société DITHEA (les Directeurs de Théâtres Associés) dirigée par Pierre Lescure, avec un comité d’organisation présidé par France télévision organise le Palmarès du théâtre. Une présélection est soumise à un jury indépendant de toute actualité avec les spectacles en sélection. Un jury très cinéma, même dans la mise en scène de la remise des prix qui prend une allure de petit Cannes. Mais le jury est très motivé, ne ménage pas leurs efforts, allant voir les spectacles de la présélection. Quel dommage que le public ne fut pas au courant de cette présélection qui du temps des Molières, donnait du tonus à certains spectacles sélectionnés. Enfin la grande soirée arrive. Elle ne se déroulera pas dans un théâtre mais dans un studio de la Plaine Saint Denis. Pas de tapis rouge, point d’élégantes en robe du soir, ni de star en smoking. Le public est parqué le plus gentiment du monde dans un studio, un chauffeur de salle nous incite à applaudir (trop parfois).
Les membres du jury s’installent sur des fauteuils et canapé rouge, Patrice Leconte en est le Président. Les excellentes comédiennes Béatrice Agenin, Anne Loiret, élégantes, prennent places, suivi par le sympathique Christian Rauth, Dominique Besnehard, le réalisateur Régis Wargnier, la réalisatrice Josée Dayan, suivi par deux inconnus Marie Pierre Bordel responsable de la billetterie de la FNAC et un jeune comédien Nicolas Candoni. Ils décerneront les prix. La présentation est assurée par Aïda Touihri, très bonne liseuse de prompteur, championne dans l’interruption de phrase. Les membres du jury sont présentés dans une optique télévisuelle, Anne Loiret n’existe que par son rôle de Claude Chirac à la télévision !
Hernani © Brigitte Enguerand
Les lauréats recevront un prix, qui de loin nous avait interpellé. Les interprétations les plus folles courraient dans le public bon enfant : un sceptre, une tête de citrouille, un club de golf tronqué ! Aïda Touihri nous présente cet étrange objet qui s’allume, il s’agit d’une servante créée par le designer Hubert Le Gall. La servante est une lampe nue montée sur une hampe en bois que l’on laisse sur le plateau du théâtre lorsque le lieu est vide, c’est « l’âme du théâtre ». Les prix vont à des spectacles confirmés, parfois avec un train de retard tel celui décerné à la délicieuse Marie-Julie Baup pour Le songe d’une nuit d’été mise en scène de Nicolas Briançon crée il y a deux ans. Audrey Bonnet reçoit le prix pour la Clôture de l’amour de Pascal Rambert, déjà récompensé et à juste titre. Des fleurs pour Algernon, l’étudiante et Monsieur Henri deux petits bijoux sont récompensés, ils prouvent que le succès n’a pas forcément besoin de stars. Grégory Gadebois doit se conforter dans l’idée qu’il a bien fait de quitter la Comédie Française et c’est sa metteur en scène, Anne Kessler, sociétaire de la Comédie Française qui vient prendre son prix. François Loriquet, reçoit le prix pour un second rôle pur les Revenants, il le méritait amplement. Le bonheur de Félicien Juttner bouillant Hernani sous la houlette de Nicolas Lormeau a fait frissonner les spectateurs du Vieux Colombier. Il doit se conforter dans l’idée qu’il a bien fait de rejoindre la Comédie Française. Francine Bergé reçoit son prix d’honneur avec beaucoup d’émotion, une grande dame du théâtre, peu connue du grand public.
Le journal d’un poilu © Fabienne Rappeneau
Didier Brice, souvent nommé aux Molières, reçoit un prix hautement mérité pour Le journal d’un poilu, toujours à l’affiche du Théâtre La Bruyère. La jeunesse, encore avec Jean Bellorini pour Paroles Gelées, Ivan Calbérac le jeune et talentueux auteur de l’étudiante et Monsieur Henri et qu’il fait plaisir à voir le bonheur de Sarah Capony pour Femme de chambre. Joël Pommerat et son très beau spectacle La réunification des deux Corées ainsi que l’émouvant J’avais un beau ballon rouge avec Richard et Romane Bohringer mise en scène par Didym, François Morel pour sa carte blanche soulignent l’importance dans ce Palmarès du théâtre public. On regrettera l’absence sur le plateau de Robert Hirsh, Père émouvant qui a fait un compliment écrit fort spirituel, relayé par le facétieux Roger Dumas, le bougonnant Monsieur Henri. Les gagnants lorsqu’ils reçoivent leur prix ont un minutage sanctionné par une sonnette perturbante, qui ne sonnera pas toujours. Tous les lauréats sont parfaitement légitimes et le jury a bien travaillé.
Allez hop c’est fini. Tous les élus sous les caméras, pour la grande photo de groupe. Une cérémonie sans éclat, expédiée comme l’on se débarrasse d’un pensum. 874000 spectateurs, un échec. Pour La troupe d’un soir un 1,7 million pour ce ratage et selon un panel de spectateurs que nous avons interrogé beaucoup attendait le Palmarès. Un problème évident de communication sur l’ensemble du prix. Il serait souhaitable qu’une réconciliation se fasse entre DITHEA et l’Académie des Molières, afin d’allier la concision de l’un et le faste de l’autre. Le théâtre n’a rien à gagner dans ces dissensions intestines et stériles. Nous ne sommes pas sûrs que ceux qui pensent que l’on s’ennuie au théâtre changent d’avis après cette soirée.
Marie Laure Atinault