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Anne Sylvestre « Et elle chante encore ? » par Daniel Pantchenko aux Editions Fayard par Irène Sadowska Guillon

Posté par angelique lagarde le 15 février 2013

Anne Sylvestre « Et elle chante encore ? » par Daniel Pantchenko aux Editions Fayard par Irène Sadowska Guillon dans Actualité couv-anne-sylvestre-196x300

Anne Sylvestre « Et elle chante encore ? »
Par Daniel Pantchenko
série Biographie Éditions Fayard

J’avance et je me bats

Son œuvre, chansons et textes poétiques, où depuis bientôt 55 ans elle dépose des traces, des souvenirs de son enfance, de son adolescence, des choses vécues heureuses et douloureuses, de sa vie intime et publique de femme et d’artiste, ses engagements humains et sociaux, ses défis, ses traversées du désert et le retour à la lumière, constitue à elle seule une immense autobiographie d’Anne Sylvestre, figure essentielle, incontournable de la chanson française. Cette première biographie écrite par Daniel Pantchenko avec la complicité d’Anne Sylvestre incluant de nombreux témoignages et environ 80 interviews inédites de proches, de collaborateurs de l’artiste, de journalistes, de chanteurs et chanteuses, offre des clefs pour comprendre les fondements, les substrats familiaux, intimes, de sa personnalité, de ses appréhensions, de ses choix de vie et de sa voie artistique. Cela se lit comme un roman dont le personnage principal raconté se raconte, dialogue avec le narrateur, convoque et fait dialoguer les souvenirs, les événements de sa vie avec leurs empreintes poétiques dans son œuvre. Une vie faisant un tout avec son œuvre qui continue à s’écrire…

Après la biographie de Charles Aznavour en 2006, celle de Jean Ferrat en 2010, Daniel Pantchenko, spécialiste de la chanson française pendant plusieurs années à l’Humanité et collaborateur de la défunte revue Chorus, nous invite à retraverser à la fois la vie et l’œuvre d’Anne Sylvestre. Elle nous accompagne dans cette traversée et telle une pensée sensible et chantante de notre époque, la raconte et la réinterroge, sans compromis ni concession et toujours avec lucidité et humour. Ainsi, depuis le préambule, remontant à ses origines familiales, sa naissance en 1934 à Lyon et la période avant et pendant la guerre 1939 1945 : l’enfance heureuse et culpabilisante, marquée par la figure et « la faute » de son père, collaborateur, puis l’adolescence solitaire et douloureuse, la biographie, en quatre parties et 26 chapitres, suit la trajectoire, souvent accidentée, d’Anne Sylvestre. Les « chemins du vent » autant dans sa vie de femme que d’artiste, poète, auteur, compositeur, interprète, l’emmènent au-delà des sentiers battus, des carrières balisées, à contre-courant des modes, des tendances dominantes, à l’écart des idées collectives, des idéologies quelles qu’elles soient, vers des aventures singulières, des paris risqués, la projetant sous les projecteurs, en haut de l’affiche, et parfois dans une traversée du désert.

Elle débute en 1957 au cabaret La colombe, chante jusqu’en 1962 au Cheval d’or, au Port du salut, aux Trois baudets, enregistre son premier disque en 1959, se fait remarquer par sa chanson Mon mari est parti, reçoit en 1960 le Prix de l’Académie de la Chanson Française. En 1962 elle chante pour la première fois à Bobino et à l’Olympia en première partie de Gilbert Becaud. Alors que les Beatles lancent un nouveau style et que la génération des yé-yé débarque sur les scènes et met en transe les ados, Anne Sylvestre, tout en écrivant des chansons pour les adultes, gagne un tout jeune public en enregistrant Les fabulettes, une série de chansons pour enfants. Ce qui longtemps à tort, la fera étiqueter chanteuse pour enfants. Les succès, la reconnaissance sont là, entre 1963 et 1967 elle gagne quatre fois le Grand Prix International de l’Académie du Disque Charles Cros.

La réussite n’hypnotise pas ce personnage combattant, indomptable, farouchement indépendant. Même si c’est un éloge, elle n’aime pas être comparée à Brassens, ni d’ailleurs à personne. Pionnière à plusieurs titres elle est une des premières à créer en 1973 sa propre maison de disques. Personnage non adhésif, « dégagée » elle le dit dans La chanson dégagée « j’ai toujours refusé la dénomination engagée » dit-elle. Bagarreuse oui, mais elle n’a pas l’âme de militante ni de signeuse de pétitions. Féministe mais à sa façon. Dès les années 1960 elle s’implique dans des questions de société comme l’émancipation de la femme, sans jamais adhérer à un mouvement ni défiler sous un drapeau idéologique.

Son engagement est profondément humain, citoyen, quand elle s’élève contre l’injustice, l’inégalité et aborde, avec humour et sérieux, dans ses chansons, bien avant les autres, le viol, le choix de procréer, l’avortement, la misère, les sans-abri, les préjugés contre l’homosexualité, le mariage homosexuel, l’opportunisme des médias, mais aussi des thèmes plus universels : pollution, risque nucléaire, racisme, guerre… Les chemins du vent, ses complicités artistiques, la conduisent souvent au Québec où elle travaille beaucoup mais aussi vers d’autres formes de spectacle comme La ballade de Calamity Jane (1989) pièce musicale écrite par Jean-Pierre Leonardini, mise en scène par Viviane Théophilides, où elle joue et chante.

En 2007 elle fête ses 50 ans de chansons par une série de récitals à guichets fermés au Trianon et sort son album Bye mélanco qui n’a rien de nostalgique ni de bilan de carrière. Car Anne Sylvestre ne cesse de s’investir toujours ailleurs, de se réinventer, tout comme son public de se renouveler. De nombreux chanteurs de la nouvelle génération comme : Yves Jamait, Renan Luce, Agnès Bihl, Nicolas Bacchus, Amélie les Crayons ou Aldebert revendiquent leur filiation avec Anne Sylvestre qui en 2010 créé avec Serge Hureau le spectacle Bêtes à bon Dieu.

Elle présente son nouveau spectacle en 2011 à l’Européen, à La cigale et au Trianon à Paris, enregistre de nouveaux albums, et poursuit les tournées en France et à l’étranger, plusieurs sont prévues en 2013. Rien de sensationnel, pas de confidences croustillantes quand elle parle avec franchise de ses amours, ses amitiés, ses complicités mais aussi des ratés, des déceptions dans sa vie intime. Son oasis privé est un refuge face au monde du showbiz, des producteurs, des médias faisant et défaisant les idoles et les carrières, contre lesquels elle se bat et résiste. Ainsi, si l’on ne peut rien présager de sa postérité, on peut en revanche construire sa pérennité, ce dont Anne Sylvestre est un exemple vivant. Ce rendez-vous à ne pas manqueravec Anne Sylvestre qui chante toujours est complété par une discographie originale pour adultes, une discographie pour enfants, le site Internet, un index des noms, et, inclus dans le corps du livre, un cahier photos.

Irène Sadowska Guillon

Anne Sylvestre « Et elle chante encore ? »
Par Daniel Pantchenko
série Biographie, Éditions Fayard, 2012
476 pages prix 22 €.

 

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