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La Bohème de Puccini – Mise en scène de Robert Carsen à La Filature de Mulhouse par Angélique Lagarde

Posté par angelique lagarde le 11 novembre 2011

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La Bohème © Alain Kaiser

La Bohème
De Giacomo Puccini
Scènes lyriques en quatre tableaux
Livret de Luigi Illica et Giuseppe Giacosa
Direction musicale de Stefano Ranzani
Mise en scène de Robert Carsen

Reprise par Frans de Haas
Avec Virginia Tola (Mimi), Enrique Ferrer (Rodolfo), Agnieszka Slawinska (Musetta),
Thomas Oliemans (Marcello), Yuriy Tsiple (Schaunard), Dimitri Pkhaladze (Colline) et René Schirrer (Benoît / Alcindoro).
Chœurs de l’Opéra national du Rhin
Petits Chanteurs de Strasbourg
Maîtrise de l’Opéra national du Rhin
Orchestre symphonique de Mulhouse
D’après une chorégraphie de Michael Popper
Le vendredi 18 novembre à 20h et le dimanche 20 novembre à 15h à La Filature de Mulhouse
Vu à l’Opéra National du Rhin de Strasbourg- spectacle en italien sur-titré en français

Une œuvre picturale et deux belles révélations

Puccini dans ses opéras offre souvent aux femmes des rôles sublimes, mais de sublimes martyres, de Turandot à Tosca en passant par Madame Butterfly, on pleure de leurs destins  tragiques. Composée en 1896, dans La Bohème, c’est Mimi la victime, une fleur fragile dans le champs parnassiens de l’époque de Baudelaire et Théophile Gautier. Si l’histoire d’amour entre Mimi et Rodolfo est au centre de l’intrigue, ce sont ici les voix de Musetta et Marcello qui portent aux nues cette représentation d’une grande richesse picturale.

Lorsqu’on évoque Théophile Gautier, on pense, bien entendu, à « l’art pour l’art » et au courant des parnassiens qu’ont adopté « les poètes maudits » comme mode de vie et notamment Baudelaire qui le poussera plus tard jusqu’au mystique. C’est ce Paris là que Puccini a choisi de mettre en voix et en musique. Le poète maudit c’est Rodolfo qui tombera éperdument amoureux de Mimi, sa belle voisine tuberculeuse et désargentée. Le compagnon d’art et de vie de Rodolfo, le peintre Marcello s’éprendra quant à lui de Musetta, personnage que l’on peut apercevoir comme une ébauche du Manon Lescaut de Puccini.

Dans la mise en scène de Robert Carsen, reprise ici par Frans de Haas, sa conception de l’histoire et la scénographie sont intelligemment inextricables. Rodolfo, poète et dramaturge et son ami peintre, Marcello, sont transis de froid dans leur petit appartement meublé d’un lit de fer, de deux chaises, d’un vieux piano droit, d’une table d’écriture pour l’un, d’un chevalet pour l’autre et d’un poêle dont le tuyau les relie au ciel. L’espace de l’appartement est délimité par un carré au centre de scène qui évoque l’exiguïté du lieu perdu au milieu d’un plateau au revêtement lunaire comme hors du temps, comme sorti d’une œuvre de Beckett où à défaut de Godot, c’est l’argent qui se fait attendre. Deux joyeux lurons, Schaunard et Colline tout aussi désargentés viennent les rejoindre pour que tous les quatre aillent fêter le réveillon au Quartier Latin, au Café Momus plus exactement. Ils seront légèrement retardés par la visite du propriétaire puis les amis partent en tête pendant que Rodolfo finit vite un article. C’est là que la belle Mimi fait son entrée. Sans le sous, elle a le minois d’une princesse mais l’apparat d’une pauvresse. C’est le coup de foudre. Rodolfo l’emmène festoyer chez Momus !

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La Bohème © Alain Kaiser

Le deuxième acte s’ouvre alors sur la représentation de la bohème dans toute sa splendeur, trois ou quatre pianos délimitent ces espaces de liberté où l’alcool coule à flot. L’arrivée de Musetta au bras d’un riche bourgeois brise le cœur de Marcello mais très vite, la mascarade prend fin et elle tombe dans ses bras. Louons le jeu du grand nombre de figurants qui participent à ce tableau festif afin de donner corps à cette bohème. On peut en revanche s’étonner de l’aspect orgiaque de ce réveillon qui est probablement plus en adéquation avec le regard du metteur en scène sur l’époque qu’avec l’œuvre elle-même. Néanmoins, il faut saluer la chorégraphie qui offre une parfaite fluidité à l’ensemble.

La fête est finie, Mimi est de plus en plus malade, la tuberculose ne lui laissera que peu de répit pour vivre son amour. Le troisième tableau s’ouvre sur une scène très sombre, au sens propre comme au sens figuré. Mimi arpente une ruelle noire à la recherche de Marcello pour lui confier ses tourments. Apparaît alors une taverne dont on ne perçoit que des ombres derrière la fenêtre et le rire de Musetta qui transperce l’aube. Les protagonistes restent dans la rue tandis que l’attitude chancelante de Mimi une bouteille à la main, choix dramaturgique discutable, accentue le pathétique de la situation. Rodolfo s’en effondre et avoue sa faiblesse face à la mort imminente de sa belle.

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La Bohème © Alain Kaiser

Une peinture de Van Gogh ou un roman de Giono, voilà tel que se figure le plateau final jonché de fleurs jaunes qui évoquent le renouveau, le printemps, le Regain. Nous retrouvons dans leur petit appartement au centre de la scène Rodolfo et Marcello qui feignent le bonheur mais ne supportent pas l’absence de Mimi et Musetta qui les ont abandonnés. Soudain, Musetta fait irruption annonçant l’état déplorable de Mimi qui se dirige vers le petit studio… Bien entendu, la fin sera tragique mais par cette scénographie, le choix de Robert Carsen semble être au-delà de la mort, celui d’un nouvel éveil.

Nous avions été prévenus ce soir là d’un malheureux refroidissement qui risquait d’altérer la voix de la soprano Virginia Tola (Mimi) aussi, si la prestation semblait difficile, nous ne lui en tiendrons pas rigueur car de surcroît, elle a mis en lumière celle de la soprano Agnieszka Slawinska (Musetta), absolument remarquable. De même si le souffle a semblé un peu court au ténor Enrique Ferrer (Rodolfo), le baryton Thomas Oliemans (Marcello) a sublimé la partition de son personnage. Nous vous conseillons de réserver immédiatement vos places à la filature de Mulhouse pour entendre ces deux belles révélations vocales mis en exergue par la fabuleuse direction musicale de Stefano Ranzani de l’Orchestre symphonique de Mulhouse, sur un fond pictural des plus riches, de l’esthétique de l’absurde au fauvisme.

Angélique Lagarde

La Filature
20, allée Nathan-Katz
68090 Mulhouse cedex
Réservations au 03 89 36 28 29
Site internet de l’Opéra national du Rhin

 

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